SAINT EXUPÉRY, il y a 60 ans, déposait son Petit Prince sur la Terre. Le petit bonhomme blond avait, auparavant, exploré d’autres planètes : celle du roi en quête d’autorité, celui du vaniteux à la recherche d’admirateurs, celle du buveur pétri de la honte de boire, celle du businessman avide de possessions, celle de l’allumeur de réverbères tellement fidèle à la consigne, celle du géographe à la poursuite d’un concret incontestable.
Que diriez-vous, cette année, d’aller prospecter « l’astéroïde 331 » ? Le Géographe en ignore l’existence, parce qu’aucun explorateur, à ce jour, ne lui a fait de rapport circonstancié. C’est une planète que le Petit Prince aurait sans doute aimée. Elle n’est pas habitée par des grandes personnes étranges, bizarres, très très bizarres, extraordinaires, ridicules, comme celles qu’il a rencontrées sur les autres astéroïdes. L’allumeur de réverbères « s’occupe d’autre chose que de soi-même » ; les habitants de l’astéroïde 331 – je dis « les », parce qu’ils sont nombreux – s’occupent d’eux en s’occupant de leur planète, que Saint Exupéry aurait appelée « LA PLANÈTE DES ÉCOLOGUES ».
Ajoutons dix mois de vie à notre Petit Prince, avant que le serpent, d’un éclair jaune près de sa cheville, ne le fasse tomber doucement comme un arbre sur le sable du désert…
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| … Lorsque l’enfant aux cheveux d’or arrive sur l’astéroïde 331, il est saisi par la grande agitation qui y règne : tout le monde est absorbé par une tâche ! Mais ce qui frappe le Petit Prince, c’est que tout le monde communique, échange, dialogue, argumente, analyse, raisonne, sans jamais chicaner, disputailler, barguigner, admonester, quereller. Les habitants de cette planète collaborent, coopèrent. Au milieu de cette effervescence, le Petit Prince se dit que jamais personne ne l’écoutera et ne répondra à ses questions. Mais il ose quand même : « Que faîtes-vous ? », demande-t-il. Il a tellement l’habitude de ces adultes qui ne répondent pas aux questions, qu’il s’apprête à la réitérer. Mais les écologues suspendent leurs occupations aussitôt et se tournent vers l’enfant :
- Nous avons appris que toutes les planètes qui nous entourent sont en danger de disparition, et nous cherchons pourquoi et comment y remédier.
- Toutes les planètes ? murmure le Petit Prince
- Oui, répondent les écologues. Sur la plus grosse d’entre toutes, qui s’appelle la Terre, les habitants font n’importe quoi et ils sont en train de la faire mourir. Et si la Terre meurt, les autres planètes aussi !
- Même la mienne ? interroge le Petit Prince atterré. Même celle de l’allumeur de réverbères ? Il n’y aura plus de couchers de soleil ? Et ma rose ? Vous croyez que ses quatre épines vont la protéger ?
- Hélas ! Si les habitants de la Terre continuent comme ça, rien ne survivra !
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